GUIBERT FRANCOIS Admin
Messages : 1032 Date d'inscription : 12/07/2008 Age : 51 Localisation : “Chez Moi À Paris”
| Sujet: Re: MARIE FRANCE + MIAM MONSTER MIAM & LES LOVED DRONES 28 & 29/04/2011 CWB (Paris) : compte rendu Lun 9 Mai - 0:03 | |
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Compte rendu des deux concerts
de
MIAM MONSTER MIAM ET LES LOVED DRONES
+ MARIE FRANCE
+ JACQUES DUVALL
+ PASCALE BOREL
+ ALEX ROSSI
+ ALISTER
+ SABINO ORSINI
Jeudi 28 et vendredi 29 avril 201
au Centre Wallonie-Bruxelles (Paris)
en ligne sur ce lien : http://lachanteusemariefrance.fr.gd/MARIE-FRANCE%2C-MIAM-MONSTER-MIAM-ET-LES-LOVED-DRONES%2C-JACQUES-DUVALL%2C-PASCALE-BOREL%2C-ALEX-ROSSI%2C-ALISTER%2C-SABINO-ORSINI-les-28-et-29-avril-2011-au-CENTRE-WALLONIE-BRUXELLES--k1-Paris-k2--.-.htm
De ces deux concerts-électrochocs et percutants made by Freaksville Record, le plus scotchant, au niveau impact sonore, est celui du vendredi 29. Dès 20h30, heure où commence le concert, la salle — capacité d’accueil : 165 places — est quasi complète, à vingt fauteuils près. Or, le jeudi 28, la mauvaise habitude des Parisiens à arriver toujours trente minutes en retard par rapport aux horaires indiqués sur les tickets de concerts fait que les sièges ne se rempliront qu’au fur et à mesure des chansons.
Le 29, les voix sont super nettes et claires durant l’intégralité du show, et ce dès “La femme plastique” (deuxième titre du set). La veille, quel que soit l’endroit où l’on se trouve dans l’assistance, il faut attendre le huitième morceau (“Il doit y avoir un truc” de Jacques Duvall) pour que la voix de Miam soit dans les enceintes au même niveau, ou plus, que le son des instruments.
Le 28, le public est, disons, dans la retenue et la sobriété. Le 29, les spectateurs sont beaucoup plus extravertis, en ébullition dès “A.rtificial Radar Turbulence”, pétaradant générique d’ouverture. Jusqu’au dernier morceau (l’instrumental surprise, non prévu, “Rumble” de Link Wray), on entendra des sifflements (positifs) et autres hurrahs enthousiastes de la part des spectateurs.
En tout cas, chacun des deux soirs, la qualité d’écoute des spectateurs plus l’attention portée par ces derniers aux artistes présents sur scène seront exactement les mêmes. Et ça, un public concerné par ce qu’il se passe sur scène, venu à 100 % pour les Loved Drones et leurs invités, et pas pour se montrer ou faire le beau comme si on était dans un cocktail mondain à la noix, c’est inestimable.
« Je suis très heureux d’être ici ce soir ! En plus, on est un peu ici comme chez nous : le Centre Wallonie-Bruxelles », annonce Miam en intro de “La femme plastique”. Il s’agit du titre éponyme de son dernier opus. Ce disque est un nouveau chef-d’oeuvre Freaksville, le meilleur album sorti en 2010 (avec le CD “5/5” des Shades). Excitation, énergie, intensité, créativité, vraies chansons 1 2 3 4 carrées, superbement construites et arrangées (le tout en quelques jours seulement, à Londres à l’automne 2009) : voilà ce que sont, sur scène comme sur platine laser, les Loved Drones — et, de manière plus générale, les productions Freaksville (Phantom, Jacques Duvall, etc.).
"J'ai écrit cette chanson alors que j'étais à Moscou dans le cadre de l'Eurovision pour représenter la Belgique avec un autre titre interprété par un chanteur rockabilly, se souvient Miam. On a obtenu... 1 point. Je remercie l’Azerbaïdjan, ou le petit pays qui a voté pour nous ! » Miam interprète alors “J’aurai ta peau”, en duo avec Alex Rossi. Un genre de rock'n'roll radio song francophone parfaite, dans la lignée des inoubliables tubes french pop de la fin des années 1980, et que le paysage musical français n'offre plus depuis deux décennies.
« Avec Jacques Duvall, on a fait cette chanson à propos d’un type qui ne fait confiance qu’aux mensonges des jolies filles. » “Le roi des paranos” est un épatant morceau bastringue mais version classe, plein d’évidence et de joie. Avec, en plus, le solo 100 % rock alternatif, millésime 1989 justement, de trompette enchanteuse de Philippe Laurent au milieu du titre. Philippe, par ailleurs, apposera le son de sa trompette, entre probable background jazz et énergie live alternative, sur la plupart des titres joués, via des solos ici ou là, plutôt que de façon rythmique.
« Voici du germano-italo-belge : “Blues Automatiek” ! » Un super instrumental, à la rythmique implacable. On retrouve du blues avec les sons d’harmonica azimutés que joue Miam. Et de l’electro pop par la voix de Miam qui, à travers une sorte de Vocoder, chante « Blues Automatieeeeek ! Blues Automatieeeek ! » (les seules paroles de la chanson), accompagné des sons déglinguos qu’il triture sur cette même machine. Il y a même du hip hop aussi, via le flow que dégaine l'invité rapper Sabino Orsini pendant une douzaine de vers en italien. Après un break vocal a cappella d’une vingtaine de secondes de « Blues automatiektiektiek » où Miam délire joyeusement, le morceau reprend de plus belle, dans une ambiance électrisante.
Arrive l’un des deux moments banaux du show (avec plus tard, dans un autre genre plus à la Pink Floyd matiné d’une ambiance progressive rock, “Erotomane”) : “Intoxicated Man”, une reprise jazzy de Serge Gainsbourg sous influence pop louche freaksvillienne par Miam.
Le premier soir, les paroles sont inaudibles. Par contre, on les entend bien lors du deuxième concert. Quelque part, ce qui cloche, c'est que la musique d'“Intoxicated Man” est “différente” des autres titres du set, ce qui fait que cette reprise est presque hors sujet. Ou, en tout cas, assez classique dans sa forme. Elle est épurée, ou plutôt sonnant presque comme du jazz “normal”, avec quasiment juste les balais de Jérôme Danthinne frottés contre sa caisse claire et la basse de Pascal “Scalp” Schyns. Plus quelques sons au clavier de Brian. Bon.
« On va continuer dans les gainsboureries. Dans les années 80, elle faisait partie de Mikado, un groupe que j’ai beaucoup écouté quand j’étais adolescent. C’était sur Les Disques du Crépuscule. Je vous demande d’accueillir Pascale Borel ! » Pascale, elle aussi, subit la sonorisation vocale approximative le premier soir (mais pas le deuxième) lors de sa reprise bon esprit de “Contact”. En robe rouge, tout en chantant, elle fait des gestes d’automate, un peu comme Robby le Robot dans le film “Planète interdite” (1956). Pour être raccord avec la prestation de BB dans son “Show Bardot” de 1968 sur ce titre. Et pour que cela corresponde à l’ambiance “années 1960, retour vers le futur” que suggère cet ovni poppy made by Gainsbourg pour l’égérie BB.
D'ailleurs, le 29, pendant que Pascale chante “Contact”, on devine le clin d’oeil fait à Brigitte Bardot par Marie France. En effet, située derrière le rideau de scène (même si nous, le public, ne la voyons pas), notre miss France diffuse sur scène puis dans la salle, discrètement mais sûrement, l’odeur de L’Heure Bleue de Guerlain. Il s’agit du parfum fétiche de la Reine du rock’n’roll, celui qu’elle utilise depuis de nombreuses années.
« Le prochain invité qui va venir sur scène, j’ai écrit une centaine de chansons avec lui. C’est un grand honneur pour moi dans ma vie de l’avoir rencontré : le grand, l’unique Jacques Duvall from Brussels ! »
Relax (faussement, car sans doute stressé à l’idée de chanter en public), le maestro Duvall arrive alors, de l’entrée des loges où il assistait, peinard, à tout le début du show : "Ah, c'est une belle soirée, les Loved Drones derrière moi, le tout-Paris devant moi ! Tiens, y a-t-il des Flamands dans la salle ?" Un « ouii ! » masculin se fait entendre. « Aaah ! Eh bien (Jacques s’adressant alors audit Flamand), je te dédie cette chanson ! C’est un grand classique Freaksville, sur le premier album “Hantises” de Phantom, paru en 2006. »
— De quoi parle cette chanson, Jacques ? Car je n’ai pas vraiment écouté le texte, dit Miam (ça tourne soudainement à un sketch à la Brok & Chnock entre Duvall et lui).
« Eh bien, si tu veux, Benjamin, c’est l’histoire d’un pauvre prestidigitateur qui est amoureux de son assistante. Elle doit normalement se faire découper en deux — pour rire. Sauf que, parfois, les choses ne se passent pas toujours comme on le voudrait... »
Le premier soir, variant les plaisirs, Jacques présente “Il doit y avoir un truc (c’est pas possible !)” comme ceci : « Je tiens à dédier le morceau qui va suivre à l’une de nos idoles, une grande actrice : Annie Girardot. Je m’identifie à elle. Comme elle, je suis atteint par la limite d’âge et Alzheimer, ce qui explique le 'copiant' (feuille sur laquelle il y a les paroles mais dont, en fait, il n’aura pas besoin) que je tiens à portée de main."
Jacques a beau clamer partout dans ses interviews (presse, radio) qu’il ne sait pas chanter, il se trompe : c’est un sacré chanteur de blues, de rock’n’roll. Il est l’antithèse totale des rois de la technique vocale, et si ennuyeux à entendre, tels que Luciano Pavarotti ou Florent Pagny. Et justement, sa voix rauque du vingt-et-unième siècle est prenante, captivante. Elle est d’ailleurs très différente et toute aussi super à entendre que sa voix masculinement féline de ses 45 tours et 33 tours des années 1980 (sur des musiques notamment de Jay Alanski).
Sur scène, sa timidité naturelle (« qui peut parfois passer pour de l’arrogance », déclarait-il récemment dans le magazine Longueur d’ondes) fait qu’il devient une sorte de talentueux Fou Chantant incontrôlable, échappé de l’asile le temps d’une prestation sur scène. Mais sans que ce soit non plus n’importe quoi, attention. Bien qu’habillé en tenue de ville (même sur scène, il garde son blouson avec lequel il est venu), il dégage quelque chose d’intense, dans la façon de se tenir — rigide, nerveuse, ou bien se pliant quasiment en deux à certains moments — comme dans sa voix. Pour “Il doit y avoir un truc (c’est pas possible !)”, il prononce chaque mot qu’il a écrit avec une réjouissante maniaquerie, une intensité de psychopathe qui font plaisir à voir et à entendre.
Sur deux vers, à la fin du morceau, il prend une intonation super drôle, totale Johnny Hallyday 70s allant à fond dans le trip crooner dans un show Maritie & Gilbert Carpentier, mixé à la voix pachydermique d’Elvis à Las Vegas. Enfin, il improvise les mots suivants en hurlant comme un forcené kimfowlesque : « Je vais pas passer ma vie ici, au Centre Wallonie, où il y a un seul Flamand et plein de Wallons ! Pitiééé, pas çaa !"
Duvall, c’est le meilleur parolier francophone (avec Jean-William Thoury). Il est plus pertinent, moins “gros sabots” que Serge Gainsbourg, dans sa façon d’aborder les thèmes, de les retourner, de les aborder (un exemple parmi des centaines d’autres : “Quand vas-tu te décider à me décevoir ?” pour Alain Chamfort, d'ailleurs présent dans la salle les deux soirs).
« Vous connaissez Charleroi ? C’est le Bronx. On y trouve des dealers, des traficants d’armes, etc. Voici une fiction futuriste, étalée sur plusieurs années. J’ai beaucoup travaillé avec un ami universitaire. Je me suis documenté auprès de nombreuses sources : “Charleroi 2035”. » Sur une musique lancinante spéciale serial killers, ce texte, signé Jacques Duvall, est comme un miniscénario de film. Il met en exergue l’une des chouettes marottes de Miam, à savoir la science-fiction de série B ou Z, les nanars dont sont friands (entre autres) Jean-Pierre Putters du magazine Mad Movies, Jean-Pierre Dionnet, les The Cramps, etc.
« J’ai fait un rêve. Tout le monde en fait mais pas celui-là : j’ai rêvé de la création métaphysique de l’univers cosmique. Et là, soudain, Erotoman m’est apparu. Voici donc une de mes poésies — car je suis aussi poète — sur une musique improvisée à partir d’une musique de film de Dario Argento que j’aime. » “Erotoman” est le moment psychédélique, voulu et assumé comme tel par Miam, du show Loved Drones : son planant, guitares étranges, tempo ralenti, vibrations 70s garanties.
Toutefois, la version présentée par le groupe le 19 janvier à Bruxelles, et mise en ligne dès le lendemain sur internet par Miam, est beaucoup plus éclatante : il s’agit du même texte mais sur la musique du “Pénitencier” de Johnny Hallyday (proche d’ailleurs des arrangements du “Flashback Tour” 2006/2007 d’Yvan Cassar).
« Une petite surprise, maintenant : en 2009, on a sorti “Phantom Feat. Lio”, un disque excellent (à ce moment, on entend dans la salle la voix de Lio, assise vers le 7e rang, qui confirme d’un « ouaaiis !! » résonnant dans toute la salle), un des chefs-d’oeuvre de Freaksville. On a beaucoup tourné avec Lio. Et lors de ces concerts, on a souvent joué le morceau qui vient, interprété ce soir par Alister : “Amoureux solitaires” (1). »
Chez d’autres jeunes artistes plus strictement chanson française, la démarche débonnaire, cool Raoul, et le phrasé vocal en apparence nonchalant — mais en fait travaillé, un peu comme l'est celui de Daniel Darc — apparaîtraient comme de l’arrogance ou du je-m’en-foutisme. Alister, lui, avec cette façon de faire croire qu’il va dérailler puis de se raccrocher aux mots à la fin du vers, assure, lorsqu’on l’écoute reprendre cette chanson.
La relecture musicale des Loved Drones de ce tube, avec basse, batterie, guitares, est meilleure que l’instrumental de la version studio originale (très bien produite) car plus vivante, plus live.
« En 2008, on a sorti un album intitulé “Phantom Featuring Marie France”, sur lequel se trouve la chanson “Les nanas”. » Benjamin envoie le riff d’intro de ce blues rock’n’roll qu’il a écrit pour la Seule Vraie Chanteuse de r’n’r au monde. Celle-ci arrive du fond de la scène au même moment, lovée dans une robe panthère, la chevelure désormais rousse (comme sur la pochette du 33 tours “39° de fièvre”).
Avant même qu’elle ne chante, Marie France subjugue l’assistance par sa beauté, sa présence animale, son charisme inné, sa manière digne, forte et charmeuse de se déplacer. Chacun des deux soirs, elle livrera une prestation phénoménale d’une bonne vingtaine de minutes (soit au total quasiment trois quarts d’heure), aussi intense l’une que l’autre.
Sur “Les nanas”, par exemple, en passant des couplets au refrain, elle multiplie de façon spontanée et naturelle les intonations. Ce texte pro-féministe est encore un exemple parfait de l’art qu’a Duvall de traiter d’un thème en prenant (en apparence et de façon astucieuse) le contrepied de celui-ci. Le tout avec un coupable, délicieux et malin plaisir. Depuis son premier 45 tours “Déréglée”/ “Daisy” où il écrivait déjà ses textes, Marie France est pleinement conscience d’être servie par ce génial auteur, qui lui offre à chaque nouvelle chanson des textes-bijoux inattendus, surprenants et souvent à double sens.
« Je suis très heureuse de revoir mes amis, Miam Monster Miam, les Loved Drones, ex-Phantom,déclare-t-elle, très émue. J’espère qu’on reviendra jouer ici. Voici “Bleu”, autre titre extrait du magnifique album “Phantom Featuring Marie France”. » Elle prononce le mot « magnifique » sur un ton quasi intimiste. Comme si elle le disait spécialement pour Miam Monster Miam, à ses côtés, soudain lui aussi touché par ce compliment concernant ce disque qu’il a produit et dont il a composé neuf morceaux sur dix. Pour la pépite “Bleu” (illustrée de lumières bleues, justement), l’orchestration est différente du CD “Phantom Featuring Marie France”. Elle est présentée avec un autre son que la scintillante ballade féérique, aux guitares sixties, que l’on pouvait entendre sur scène en 2008/2009 avec Phantom (dont faisait partie le batteur Geoffroy Degand). Là, sous le nom Loved Drones, avec un troisième autre guitariste (Jérôme Mardaga) et le batteur Jérôme Danthinne (au son plutôt « pop anglaise », comme le décrit le guitariste Yan Péchin, présent dans la salle), le “Bleu” de Marie France se voit coloré d’arrangements noisy sound mais délicats et subtils. Et avec, via le jeu de Jérôme Mardaga, des six-cordes plus cold rock 80s qui se mêlent au gimmick sixties poppy chouettos guitaristique principal (joué par Miam), sur lequel repose le morceau.
« Flashback avec la première chanson que m’a écrite Jacques Duvall, c’était en pleine période punk : “Déréglée”. » Les Loved Drones retrouvent illico le son de la version 1977 originelle. Avec une sacrée puissance scénique et leur musicalité r’n’r. Sur cette chanson, Marie France prend un ton aiguë, impeccablement hargneux, afin de coller à l’esprit authentiquement punk de ce titre, toujours plébiscité en 2011 par les fondus de garage music.
« De mon album “39° de fièvre”, une reprise de “Fever”, adaptée en français par Boris Vian : “39° de fièvre”. » Dès que Marie France chante ce titre, la température grimpe encore plus. Claquant des doigts, elle chante de sa voix sensuelle et douce ces phrases beaucoup plus adaptées à elle et à sa personnalité qu’à Gabriel Dalar, le premier à avoir interprété ce texte en 1958 (mais de façon trop sage et un peu gauche). « 39, ça circule, comme dans les marmites de l’enfer / 40 ! Ca grésille / Ah quelle jolie façon de brûler, quelle jolie façon de brûler... » : à travers ce texte, la Princesse Electrique nous emmène avec elle dans son paradis bien réel.
Son tempérament de Fujiyama Mama fait des étincelles vocales et visuelles quand elle interprète “Le diable en personne”. Les Loved Drones jouent ce rock’n’roll chaud bouillant avec la même grâce électrique que Vincent Palmer et Dynamite Yan (de Bijou) le font sur le 33 tours “39° de fièvre” (le plus grand disque de cinquante ans de rock français, avec “Les rocks les plus terribles” de Johnny Hallyday).
A deux reprises, elle vient auprès des bienheureux et ravis spectateurs premier rang pour danser de façon attractive et sexy. Pendant, par exemple, le solo de guitare de Miam sur “Le diable en personne”.
Fougue, classe, élégance, maîtrise totale du show tout en laissant libre cours à son sens de l’improvisation, à sa façon d’être en interactivité totale avec chaque personne présente dans la salle : c’est entre autres ce que délivre Marie France en concert.
Les retrouvailles scéniques de Marie France avec les ex-Phantom devenus Loved Drones fonctionnent à plein régime. Il faut absolument que les géniaux musiciens de Freaksville continuent d’accompagner la Déesse Magique au fil des mois et années à venir. Voire même qu'ils lui concoctent de nouvelles chansons conçues sur mesure pour elle par Duvall (paroles) & Miam (musiques). Il y a entre Elle et Eux une alchimie parfaite, idéale, appuyée par l’écriture duvallienne.
Présent le jeudi 28, Brian “Android 80” Carney apporte aux Loved Drones avec son clavier des sons electro 80s synthétiques hypnotiques (par exemple, pendant “Contact”). Ca sonne beaucoup plus wild r’n’r que new wave pop rock gentillette, et tant mieux. Il chante au rappel, en sautant en l’air comme un dingo, toujours muni de ses lunettes noires caméras, une reprise punk rock allumée de “Blietzkrieg Bop” des The Ramones. Le 29, il est en revanche absent « pour cause de mariage princier », comme l'annonce mister Miam sur un ton amical poelvoordien coolos — plus probablement, Brian doit fêter ce jour-là son 47e anniversaire (mais avec un état d’esprit de 17 ans — et ça, c’est top positif).
Le 29, à la place de “Blietzkrieg Bop”, on a droit lors du rappel, en plus de l’improvisée relecture de “Rumble” (Link Wray) en final, à “J’aurai ta peau”, cette fois entièrement chanté par Alex Rossi.
« Ce type, Alex Rossi, est un génie, lance Miam. Tiens, j’aimerais que tu interprètes en entier la chanson » — « Houlà ! Euh, c’est-à-dire que j’ai bossé que le deuxième couplet, moi », s’inquiète en direct et dans le micro mister Alex. Self control, ce dernier pose près du pied de micro ses deux feuilles A4 où il a griffonné au feutre rouge les paroles de “J’aurai ta peau”. Et se lance, option “qui m’aime me suive”, les Loved Drones derrière lui, en solo sur le premier couplet, le deuxième, plus les refrains. Hop, passage réussi ! Il chante donc sans encombre ce titre rock’n’roll francophone idéal.
A la fin de sa prestation, il lui vient un cri du coeur : « Je remercie Miam Monster Miam et les Loved Drones. Je voudrais dire quelque chose : ça serait drôlement bien si on pouvait laisser Miam faire des disques en France en tant que réalisateur-producteur artistique. »
« Voici un instrumental sur deux accords, poursuit Miam. J’aime bien cela, je vais rentrer en transe pendant que je vais le jouer ! » Il s’agit du titre “Neu !” du groupe Can, un instrumental dont, a priori, l’original serait du krautrock (pour ceux qui savent ce que c’est). Miam entre alors dans une sorte de voyage intérieur, agenouillé sur le sol, sortant de sa six-cordes des sons surf’n’roll du tonnerre. Le groupe, soudé, l’accompagne en produisant un son énorme, fascinant, avec une assise solide et carrée.
« Je pourrai dire à ma maman, qui habite Charleroi, que j’ai fait un triomphe à Paris ! On va terminer par un instrumental de Link Wray, “Rumble”. Imaginez le bruit des vagues », dit-il en faisant, en mode Michel Dejeneffe, ce son précis et estivale avec sa bouche. Avant d’ajouter : « Je fais très mal le bruit des vagues. » La surf attitude de “Rumble” version Miam et ses Drones clôture en beauté ces deux soirées offertes par Marie France, Miam, Jacques Duvall, Jampur Fraize, Jérôme Mardaga, Philippe Laurent, Brian Carney et leurs invités.
Quand on assiste aux concerts Freaksville et/ou que l’on écoute les productions de ce label (“des disques qui rendent heureux”, pour reprendre l’un des slogans sur les flyers Freaksville), on trouve d’une fadeur effrayante, d’une triste banalité et d’un conformisme absolu le rock français actuel (sauf exceptions, notamment le rockabilly). Freaksville : le label le plus cool et rock’n’roll qui soit (avec Bonus Tracks Records), en plus d’être ultra réactif entre le moment où les musiciens enregistrent un disque et où celui-ci sort (à peine quelques mois, alors qu’en France, ça met un an et demi à deux ans pour que le disque sorte). Pour à chaque fois un résultat artistique dynamique, créatif et talentueusement dingo. Vive les Freaksville men and women !
François Guibert (7 mai 2011)
(1) : Concernant “Amoureux solitaires”, comme l’écrit Lio dans son livre “Pop model” (pages 60 et 61, paru en 2004 chez Flammarion), les paroles en français sont en réalité écrites par Jacques Duvall. Et non pas par Elli Medeiros. Même si c’est elle qui a signé officiellement ce texte et qui, donc, touche les droits d’auteur depuis 1980.
Dessin de Marc Le Gall (mai 2011) : "L'attaque des neuf fantastiques à Freakstown"
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