GUIBERT FRANCOIS Admin
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| Sujet: Re: Le "TOUR 2012" par JEAN-WILLIAM THOURY dans "ROCK&FOLK" (juillet 2012) Dim 1 Juil - 14:15 | |
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(mise en ligne aujourd'hui)
« Long compte rendu détaillé des trois concerts
de JOHNNY HALLYDAY & THE YAROL POUPAUD'S WILD ROCK'N'ROLL GANG
les 15, 16 & 17 juin 2012
au STADE DE FRANCE (St-Denis) »
sur ce lien (à copier-coller) : http://heartbreakhotelthehellboysnikolaacin.fr.gd/JOHNNY-HALLYDAY--g-TOUR-2012-g--les-15%2c-16-et-17-juin-2012-au-STADE-DE-FRANCE--k1-Saint_Denis-k2---d--compte-rendu-.-.htm
Avec une vingtaine photos inédites prises le 17 juin par Gilles G.
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JOHNNY HALLYDAY
(direction musicale : YAROL POUPAUD)
Vendredi 15 juin 2012 Samedi 16 juin 2012 Dimanche 17 juin 2012
au Stade de France (Saint-Denis) :
Le Yarol Poupaud’s Wild Rock’n’Roll Gang arrive à faire de “Allumer le feu” un torride et vrai morceau de rock’n’roll. Greg Zlap rafraîchit cette chanson, pourtant à l’origine bien plombante et mastoc’, en jouant avec son harmonica sur l’intro, ainsi que sur le pont entre le refrain et les couplets. En complément, derrière lui, les guitaristes Robin Lemesurier et Yarol reproduisent l’immuable riff normal auquel il est de toute façon impossible d’échapper. En tout cas, cette version est excellente. Dès ce premier titre, la voix de Johnny Hallyday vole haut dans les airs et la sonorisation. Cela sera le cas chacun de ces trois soirs. Le King du rock’n’roll est dans la place, accompagné par ce qui est son meilleur groupe de scène, avec ceux du “Tour 66” (2009) et du “Flashback Tour” (2006/2007). (1)
La nouvelle version de “Je suis né dans la rue” est sans conteste la meilleure proposée à ce jour en live par Johnny Hallyday, tous spectacles confondus. C’est le contraire de la version frigorifiée et sans âme du Bercy 1990, pas du tout mélodique ni agréable à écouter (2). Dans la nouvelle version 2012, le tempo, ralenti, est proche de la création studio originale de 1969.
La diction quasi-slammée/rappée (mais sans que cela tombe dans le jeunisme du vingt-et-unième siècle) de Johnny martelle les mots-chocs du texte-chef-d’oeuvre (3) de Long Chris.
Entre les couplets, Greg Zlap balance un solo d’enfer. Puis viennent la six-cordes aiguë, cristalline, rythmique, de Robin et celle de Yarol, alors toute en distortion mais pas du tout heavy metal ou hard rock (et tant mieux).
Lors du “Tour 2006”, le directeur musical Philippe Uminski proposait un intéressant lifting, quoiqu’un brin surchargé (entre autres dans l’intro), de “Excuse-moi partenaire”. Celle conçue par Yarol, réalisateur des arrangements musicaux du show 2012, est plus souple, plus légère, proche de la version française originelle de 1964. L’harmonica de mister Zlap est bien mis en valeur, on se croirait presque dans une ambiance de club.
“Ma gueule” roule OK. C’est bien fait, bien joué, bien chanté. Mais on ne vibre pas spécialement à l’écoute de ce titre trop entendu en concert, quels que soient les musiciens qui la jouent.
Johnny interprète “Marie” avec conviction, en y mettant toute l’émotion nécessaire. Yarol use sur ce titre d’une mandoline (comme Réjean Lachance sur le “Flashback Tour”), ce qui donne une ambiance mystique du Moyen Âge, façon “chevalier baladin électrique”. Tout le Stade vibre à l’unisson à l’écoute de ce tube populaire.
“Deux étrangers” : monumental ! L’adaptation artistique par Yvan Cassar lors du “Tour 2000” était une franche réussite. Celle créée par Yarol et le groupe 2012 l’est tout autant. A la différence qu’elle est beaucoup plus proche (hormis pour l’intro par Robin qui fait penser à celle du “Tour 2000”, donc) de la version studio qui figure sur l’album “En pièces détachées” (4). Dans la façon dont les cuivres pulsent entre chaque vers, par exemple.
L’un des moments ultra forts du show, c’est celui où, toujours sur “Deux étrangers”, Johnny se met à genoux puis se roule par terre, jouant avec son pied de micro. Il pousse sa félinité au maximum, synchronisant sa gestuelle avec les paroles (« Oohh moi je voudrais te faire mourir encore ! »). Grand régal. On vit en direct live l'un de ces nombreux moments anthologiques appelés à être rediffusés en boucle lors d’éventuels futurs documentaires télévisuels qui seront consacrés à Hallyday.
La partie symphonique (“Diego”, “Quelque chose de Tennessee”) vaut avant tout pour l’interprétation vocale magnifique et puissante du rare “Poème sur la 7e”. La façon dont Johnny déclame ce texte est beaucoup plus affinée, nuancée et maîtrisée que sur l’éprouvante version hurlée sans nuances du DVD “Bercy 1992”. Sont présents sur scène une quarantaine de musiciens de l’Orchestre de Paris, dirigés par Anne Gravoin.
En bonus de cette séquence symphonique le dimanche 17 juin, il y aura “Vivre pour le meilleur”, en duo avec la Canadienne Marie-Mai. Pour les trois premiers vers (dans le premier couplet) qu’elle interprète, on ne l’entend pas du tout dans les enceintes situés en pelouse au milieu du stade. Vingt secondes plus tard, une fois ce problème technique résolu, on l’entend faire de la démonstration technique vocale. Comme Lara Fabian sur “Requiem pour un fou” au Stade de France 1998.
Dans le deuxième couplet, Marie-Mai oublie de chanter la phrase « des femmes qui pleurent leurs enfants et restent dignes ». Ce qui crée un bizarre moment de flottement de dix secondes en plein milieu de la chanson. Durant ces cinq minutes, l’attention des spectateurs semble retomber, tant la chanson, sans aucune percussion, uniquement des violons et violoncelles, est dépourvue de rythme. Un duo sans alchimie. Retour aux orchestrations électriques et cuivrées avec “Requiem pour un fou”, dans une relecture aussi intense que celle du “Tour 66”. La version studio originale, avec la voix trop en avant et à la Michel Sardou 70s, ainsi que des arrangements rachitiques et mal fagotés, est insupportable. Celles présentées en live en 2009 et 2012 ont un côté rhythm’n’blues désespéré et poignant. “Rock’n’roll attitude” en duo avec Pascal Obispo chacun des trois soirs : un tandem sympa mais la présence de Pascal sur scène dans le cadre du “Tour 2012” de Johnny n’est pas fondamentale. Le samedi 16, Obispo livre une meilleure interprétation de cette chanson de Michel Berger que Johnny qui, uniquement pendant ce titre, a la voix éraillée, comme à bout de souffle.
Le duo 100 % anglophone avec Amy Keys, “I (Who Have Nothing)”, est avant tout une démonstration de force vocale. On a l’impression d’assister à une prestation de rock r’n’b music professionnelle et américaine à Las Vegas. Quelque chose où comptent d'abord la performance et l’endurance. Comme si on voyait en live Céline Dion, Tom Jones ou Mariah Carey. Après l'intermède rhythm'n'blues “Knock On Wood”, “Gabrielle” ouvre la deuxième partie du show, avec une intro à la guitare électroacoustique similaire à la version originale de 1976 et à celle du “Tour 66”. Comme sur la précédente tournée, Greg Zlap joue un solo central (d’au moins trois minutes) durant lequel il improvise et qui, en guise d’indication aux autres musiciens, se termine toujours de façon volontaire par la même note prolongée.
Puis Johnny reprend : « Ouais Gabrielle, tu brûles mon esprit, ton amour étrangle ma vie / Et tu chantes (etc.) » avec en plus le gros son électrique des guitares et la chouettos batterie appuyée de l’infatigable et enthousiaste Geoff Dugmore. Même si on apprécie les déhanchements que le rocker à la silhouette 1964 (pile poil identique à celle de la pochette des “Rocks les plus terribles ”) fait à ce moment-là, l’intro à la batterie de “J’la croise tous les matins” semble durer une éternité (en fait, trois à quatre minutes). Elle est répétée à trois reprises afin de mettre dans l’atmosphère crépusculaire et “Damnés de la terre” du texte.
“J’la croise tous les matins” est une sorte de blues mais du blues façon “La guitare fait mal”. C’est-à-dire avec un gros son touffu et un peu indigeste. Du “blues pour musiciens”, quelque part, pour les habitués du Chesterfield Café ou du Hard Rock Café. Des ambiances à la Georges “RTL” Lang, d’une certaine façon.
On y entend de l’émotion à travers le texte, la voix. Mais tout semble comme ampoulé : le tempo lent, les solos de guitare, la construction complexe du morceau. Il y a dans le répertoire de Johnny des blues beaucoup plus directs, percutants, simples (mais quasiment inconnus, donc impossibles à proposer dans un stade) : “Toi qui t’en vas”, “Le blues maudit”, “Le blues, ma guitare et moi”, entre autres.
La séquence acoustique est un pur bonheur visuel et auditif : vingt-cinq minutes de plaisir rock’n’roll absolu. Johnny se (re)chauffe la voix tranquillos avec “L’idole des jeunes”. Il en livre une version toute aussi émouvante que celle, burinée et où l’on sent du vécu, du disque “Nashville 1984/Les Enfants du rock”. Car cette chanson telle qu’elle est connue dans l’inconscient collectif français, c’est-à-dire la version studio de 1962, est loin d’être inoubliable : voix légère, arrangements moyens. Or là, cette version 2012 est (logiquement) plus mûre, enlevée et émouvante. “I’m Gonna Sit Right Down And Cry Over You” est chanté avec un accent impeccable. L’accompagnement musical est rock’n’roll en diable. Johnny et ses musiciens, décontractés, se lâchent, y vont à fond. Greg Zlap s’en donne à coeur joie avec son harmonica. Le côté yarolien (improvisations, spontanéité, guitares patator subtiles et musicales, etc.) de l’ensemble du groupe fonctionne à plein régime durant cette séquence acoustique.
“Elle est terrible” sonne de façon aussi sauvage, à travers le son de batterie rêche et sec de Geoff Dugmore, que sur l’orignal américain “Somethin’ Else” d’Eddie Cochran. Avec en plus, gros avantage par rapport à la version du Eddie, les paroles mythiques dans la langue de Manou Roblin, Jacques Duvall ou Jean-William Thoury, que tous les Français ont en tête, inconsciemment ou non : « C’est la plus belle de tout l’quartier / Et mon plus grand désir, c’est d’lui parler / (...) Cette fille-là mon vieux, elle est terrib’ (...) » Géante version live !
Le spécial Cochran mini Tribute se poursuit avec “Cours plus vite Charlie”, seul excellent titre du très mauvais album baba cool “Rêve et amour” (1968). Une adaptation live toute aussi nerveuse et réussie que “Elle est terrible”. Quel pied !
Lors de cette série unplugged, Johnny présente au public Robin Lemesurier (« Vous vous rendez compte ? Ca fait vingt ans qu’on joue ensemble. Vingt ans d’amitié aussi »), Geoff Dugmore (« mon Ecossais préféré ! »), Fred Jimenez (basse) et Yarol Poupaud : « Quand j’ai fait le Stade de France en 1998, en première partie il y avait un groupe qui s’appelait FFF. Il en faisait partie. Aujourd’hui, il fait partie de Black Minou. Et il joue aussi avec moi : Yarol Poupaud ! » (présentation du dimanche 17 - Black Minou ayant fait un concert surprise lors de la fête privée pour l’anniversaire de Johnny dans la nuit du 15 au 16). Greg Zlap, pour sa part, a été mis à l’honneur par le roi du rock’n’roll pendant “Gabrielle”.
Pour clôturer ce set acoustique, Johnny chante “Tes tendres années” en s’accompagnant tout seul à la guitare. Un moment symbolique mais beaucoup moins flashant que les deux morceaux joués juste avant.
De son intro à la fin du premier refrain, “Que je t’aime” a été revu et corrigé de façon simple : les notes de piano d’Alain Lanty et d’orgue de Frédéric Scamps en guise d’accompagnement, plus la voix de Johnny. Rien d’autre. Quel soulagement d’éviter l’habituel déluge d’instruments (batterie en cascade, grosses guitares, etc.) dès les premières secondes de ce titre. Ensuite dès le deuxième couplet, cela redevient la version “normale” avec les roulements de batterie, etc.
Le gospel soul’n’roll “Oh ! Ma jolie Sarah” est joué dans une très énergique version, pleine de guitares 1 2 3 4 carrées et d’harmonica échevelé. Chaque soir, Johnny peinera un peu à chanter ad lib les mots tels que « Car tout change / Et tout passe / Et tout lasse / Le désir, le plaisir se diluent dans l’espace / Mais eh eh eh / Je n’y suis pour rien / C’est affreux, déplaisant, affligeant, désolant (...) ». C’est le seul moment de faiblesse vocale, soit une minute trente par soir (c’est-à-dire rien du tout), qu’aura l’Idole du rock et roll d’ici sur deux heures trente de show quotidien.
“Cet homme que voilà” a beau être un titre rare car chanté uniquement au Stade de France 1998 et lors de l’Olympia 2000, cette ballade FM est dans la lignée du lourdingue “Derrière l’amour”. Le texte raconte des choses fortes d’écorché vif ayant souffert mais la musique, classiquement variété, le banalise. A la bonne franquette, chaque soir, Louis Bertignac jamme aux côtés de Yarol et Robin durant le puissant “Fils de personne”. Johnny, très en voix, bastonne les paroles rebelles qui lui vont comme un gant. Du rock’n’roll totalement seventies. Le Louis chante l’ultime couplet et n’est pas à la hauteur vocalement de Johnny, mais c’est secondaire. Car à l’inverse du duo sans passion avec Marie-Mai sur “Vivre pour le meilleur”, on sent une connivence spontanée entre lui, Johnny et le groupe. Un esprit de fratrie, de types heureux d’être ensemble sur scène, pour leur plaisir et celui du public, également ravi.
“L’envie” renoue avec l’intensité de la première création en live, à ce jour inégalée (la meilleure, la plus forte), de ce titre lors du spectacle “Johnny se donne à Bercy” (1987). Les guitares de Robin et Yarol se durcissent sur le deuxième couplet par rapport au premier. Les cuivres montent crescendo avant le déluge sonore et visuelle de la dernière partie de la chanson. Cette version est sublimée par tous les mots forts du texte (“Obscurité”, “lumière”, “faim”, “soif”, “festin”, “le prix de la vie”, “haine”, “amour”, etc.) placardés tour à tour, en parfaite synchro avec le chant de Johnny, en fond 3D de scène.
Hallucinant moment scénique, “Dégage” pétarade à tout-va. Cuivres, guitares, batterie, harmonica, choristes, piano y vont à fond les ballons. Avec planant au-dessus du public, des musiciens, du public, les paroles génialement déglinguos de Long Chris, scandées par le magicien électrique Hallyday. Décharges d’adrénaline, on en prend plein les yeux et les oreilles, c’est grandiose, géant.
Le samedi 16, Johnny chante “La musique que j’aime” en duo avec Eddy Mitchell. Ce dernier semble prendre quelque peu à la légère sa prestation. Afin de masquer le fait qu’il ait peu répété ce titre, il cabotine sans cesse : grognements de mots, simagrées, petits cris. Les versions en chant solo par Johnny le vendredi 15 et le dimanche 17 sont nettement plus satisfaisantes. Musicalement, le groupe livre chaque soir une relecture d’un égal niveau impeccable de rock’n’roll blues.
Accompagné au piano (sur ce titre uniquement) par Yvan Cassar, Johnny livre aux dizaines de milliers de spectateurs les ultimes frissons de ce spectacle avec “Quand on n’a que l’amour”. Une reprise de Jacques Brel, classe et digne, qui clôture en douceur et sobriété deux heures quinze d'un show historique. « Vous êtes formidables. Merci pour votre accueil. Je ne vous oublierai jamais. Je vous aime, bonne fin de soirée, merci. »
François Guibert (30 juin 2012)
(1) : Sans oublier les démentiels Joey & The Showmen sur l’album studio “Johnny, reviens ! Les rocks les plus terribles” (1964). Le CD de Johnny Hallyday à avoir, s’il ne faut en garder qu’un seul. Le meilleur disque de six décennies de rock’n’roll (en) français avec “39° de fièvre” (1981) de Marie France.
(2) : comme d’ailleurs l’intégralité des shows hard variété FM ultra lourdingues et affreux de Bercy 1990 et 1992.
(3) : avec la chanson “La génération perdue”.
(4) : paru en 1981, réalisé par Eddie Vartan, “En pièces détachées” est un bon petit album sympathique de rock blues pied nickelé, à la voix ô combien vitaminée. Un disque de série B doté de plein de défauts un peu partout mais très sympa à réécouter régulièrement. Beaucoup plus par exemple que les pompiers “Ca ne change pas un homme” (1991), “Ce que je sais” (1998) ou “A la vie, à la mort !” (2003).
© Photos ci-dessus : Gilles G. (17 juin 2012)
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